Dans cet article, l’auteur cherche à épingler ce qui caractérise les deux grandes théories qui dominent actuellement les recherches en didactique des mathématiques en France ( la « théorie des situations » développée par Guy Brousseau d’une part et la « théorie anthropologique » de Yves Chevallard de l’autre) : en quoi paradoxalement ces deux théories se complètent-elles et s’opposent-elles radicalement ?
Pour expliquer cela, l’auteur montre d’abord comment la théorie des situations est entièrement tournée vers la recherche de moyens didactiques qui devraient permettre à l’élève de « faire des mathématiques en cours de mathématiques ». La notion de situation fondamentale est dans cette théorie l’outil clef de la dévolution à l’élève d’une réelle responsabilité scientifique sur le sens, la pertinence, la cohérence et la vérité des assertions discutées en classe.
L’auteur montre ensuite que si la théorie anthropologique est au pied de la lettre en contradiction avec la théorie des situations (puisque poussée à l’extrême elle montre que l’essentiel de ce qui est visé par la théorie des situations est une utopie inaccessible dans le réel de l’enseignement), elle peut dans une lecture au deuxième degré lui être très complémentaire : elle fait prendre conscience au professeur de tout ce qui va « institutionnellement, anthropologiquement » s’opposer à son désir de « faire faire des mathématiques » à ses élèves ou à ses étudiants, elle l’aide à ne pas mettre en oeuvre « trop naïvement » la théorie des situations.
Ce que cet article tente d’analyser, c’est donc le paradoxe de cette opposition/complémentarité qui, s’il est compris comme tel, fait de la confrontation de ces deux théories un remarquable outil pour le progrès de l’enseignement.
En conclusion, Marc Legrand indique en quoi une théorie comme celle du « débat scientifique » est précisément le fruit de la complémentarité-opposition entre les deux théories précédentes.