La pensée mathématique contemporaine.
Auteur : Patras Frédéric
Résumé
Voici un essai d’histoire des mathématiques qui lie étroitement avancées mathématiques, réflexion philosophique sur leur nature et positionnements culturels. En sus d’une « Introduction » et d’une « Conclusion » consistantes, l’ouvrage compte huit chapitres.
Dialectiquement l’auteur professe un refus « de ruptures ou d’innovations spectaculaires » qui « occulterait le travail, généralement long, de maturation des concepts » et la nécessité de focaliser sur des prises de conscience fondamentales. Ainsi, sans négliger d’évoquer des précurseurs, insiste-t-il sur quelques porte-drapeaux souvent très célèbres ou, pour quelques-uns, un peu négligés…
Le chapitre 1, De Platon à Husserl » appréhende une évolution du statut des objets mathématiques qui passe par Descartes (et ses interférences maths-théologie), Kant (longuement étudié), etc., pour en venir à la pensée de Husserl où « les maths redeviennent un mode d’accès privilégié à l’idée normative de la raison pure », l’existence des concepts y étant » assurée sans avoir à revenir sans cesse aux intuitions à partir desquelles on a pu les abstraire » avec, d’ailleurs, une « certaine flexibilité ».
Le chapitre 3 aborde « Les origines des mathématiques modernes ». Il magnifie Leibniz qui, en avance de plus de deux siècles « allait » directement aux notions les plus générales, obtenues en dégageant dans une classe de problèmes des structures typiques et régulières « . L’auteur insiste ensuite sur Gauss (et sa capacité à multiplier les accès à un concept), Galois (« traitant comme des objets d’étude autonomes les intuitions et les structures qui apparaissent dans les tentatives de résolution d’un problème »), Dedekind (rapproché d’Eudoxe…), Frege (et sa distinction entre sens et référence).
Le chapitre 4 « Axiomes et Intuitions », dominé par Hilbert, « réhabilite » le grand Hermann Weyl qui sut « donner à voir au grand public [cf. son ouvrage « Symmetry »] l’origine et la nature d’harmonies cachées entre le monde sensible et celui des idées mathématiques ». Weyl loue « l’interaction entre axiomatique et construction ». Comme le note F. Patras, « … les grands théorèmes procèdent toujours de l’étude d’objets déterminés, jamais d’un simple jeu de formules ». De quoi revenir, aussi, sur l’opposition « entre l’intuitionnisme brouwérien et le formalisme hilbertien », et louer à nouveau Husserl…
Le chapitre 5 « Le courant structuraliste » note combien celui-ci déborde les mathématiques et salue « le véritable tournant programmatique et structural » de l’algèbre accompli, en 1930, par Van der Waerden avec sa « Modern Algebra ».
Alors vint Bourbaki, longuement présenté, disséqué, analysé avec ses générosités et ses ambitions – qui subjuguent F. Patras -, et ses failles qu’il observe lucidement en les attribuant à une vision trop prégnante d’un structuralisme mathématique.
Le chapitre 6 « Structures et catégories » revient sur le désenchantement à l’égard des Bourbaki et sur une grande théorie novatrice, les catégories, déjà magnifiée au Chapitre 1. S’y ajoute la » théorie des topoï « , à partir de Riemann, » des travaux d’Alexandre Grothendieck autour des notions de revêtement et de recouvrement « .
F. Patras déplore un enseignement des mathématiques dans le Secondaire de plus en plus rétréci, voire « réduit à quelques résidus insipides et peu formateurs ». « On chercherait en vain un grand projet », « les questions épistémologiques ont été reléguées hors du champ d’activité des mathématiciens au travail, conduisant ainsi à une sclérose culturelle et morale ». « Il faut à nouveau insuffler aux mathématiques une vie spirituelle qui transcende les seuls aspects techniques ».
Les chapitres 7, « Les demeures de la pensée », et 8, « A la rencontre du réel », en appellent pourtant à l’espérance, en analysant des apports exemplaires de Grothendieck, toujours, et de René Thom, parfois, en insistant sur la nécessité de « faire exister un espace où l’intuition puisse exprimer ses droits », où l’on joue le jeu « de projets, d’analogies, d’ambitions incertaines, de paris », où l’on cherche » la plus grande généralité, au service du sens « où l’on s’intéresse à la forme » à la beauté, à l’harmonie des êtres mathématiques « Les éloges de Thom, Grothendieck, Weyl vont de pair avec ceux d’Aristote et d’Husserl et avec un hymne à l’inventivité, à la créativité, à la capacité » d’écoute de la voix des choses ».
Notes
Cet ouvrage est l’objet d’une recension dans la rubrique « matériaux pour une documentation » du Bulletin de l’APMEP n° 435.
Données de publication
Éditeur Presses Universitaires de France (PUF) Paris , 2002 Collection Science, histoire et société Format 15 cm x 21,7 cm, 208 p. Index Bibliogr. p. 189-191
ISBN 2-13-051678-5
Public visé tout public
Type monographie, polycopié Langue français Support papier
Classification