Cet article présente une analyse historique des instruments de calcul, en particulier des différents types d’abaques. Cette analyse se place à l’échelle de plusieurs siècles et de populations entières. Elle montre l’influence des artéfacts sur les pratiques mathématiques. Les abaques ont été le principal instrument de calcul de l’humanité pendant plus de 2000 ans. Les traces de l’existence d’éventuels instruments de calcul ont été retrouvées chez beaucoup de populations, mais c’est plutôt dans le monde gréco-romain que l’on trouve les premières preuves tangibles de l’utilisation d’abaques. A propos des abaques grecs, l’auteur présente trois façons de disposer les cailloux sur les surfaces à calculer. Quant aux Romains, on a de leurs abaques plusieurs sources écrites, ainsi que divers témoignages archéologiques. Dans le monde asiatique, et bien avant le boulier, au moins dès le IIe siècle avant notre ère, l’outil de calcul utilisé en Chine était constitué d’un ensemble de baguettes à calculer. Ces bouliers sont toujours en usage dans les pays asiatiques, bien qu’ils tendent à disparaitre rapidement en butte à la concurrence des calculatrices électroniques. En Occident, où la pratique du calcul sur l’abaque à jetons a perduré au moins jusqu’à la fin du 18e siècle, les traités de calcul avec les jetons ont fleuri tout au long de cette période. « Toujours présents dans notre inconscient collectif, les abaques à jetons et bouliers structurent notre façon d’écrire les nombres et d’opérer sur eux. Dans la mesure où ils sont accessibles très tôt, avant même la maitrise de l’écriture, et parce qu’ils permettent un calcul concret par manipulation d’objets matériels, sans doute est-il pertinent de chercher à les exploiter aujourd’hui d’un point de vue didactique pour faciliter l’entrée des jeunes dans le monde numérique. » C’est par ce questionnement que l’auteur termine son article.