Les probabilités et les statistiques sont apparues dans des contextes historiques, mathématiques et épistémologiques bien différents. Dans la genèse des probabilités, Pascal invente une géométrie du hasard qui traite rigoureusement de l’incertitude, puis Leibniz imagine une sorte de logique qui règle le poids des vraisemblances. Tandis que les calculs statistiques sur les impôts, la mortalité, les récoltes, les maladies, etc. sont encouragés par les gouvernements, comme moyens d’observation et d’aide à la décision. La statistique, comme son nom l’indique, traite des choses de l’Etat. Les histoires rassemblées dans cet ouvrage s’intéressent à la naissance et au développement des probabilités et des statistiques, mais aussi à la rencontre de ces deux disciplines et à leurs rapports successifs dans l’histoire.
Ce retour à l’histoire répond à des questionnements d’enseignement bien actuels, car c’est au moment même où il faut construire un enseignement des deux disciplines, que leur association apparaît encore et toujours difficile, presque étrange.
Les trois premières parties de l’ouvrage invitent le lecteur à entrer dans le monde des probabilités et des statistiques par des problèmes historiques. Dans la première partie, sont présentés des problèmes de chances et de hasards, à commencer par le problème des partis qui fit s’opposer Pascal et Fermat durant l’été 1654. La seconde partie concerne le problème des décisions, comme le prix des assurances sur la vie ou l’estimation des rentes à partir des tables de mortalité ou natalité. Dans la troisième partie, les probabilités et les statistiques se rencontrent sur le plan théorique, mais encore à l’occasion de questions pratiques, comme la cartographie ou la culture de l’orge. De ce problème des problèmes naît celui de la modélisation.
La quatrième partie met l’accent sur les causes, que les probabilistes et statisticiens envisagent différemment. Elle commence sur la controverse de l’Antiquité sur le problème à déterminer la vérité d’un énoncé dépendante du futur. Vingt siècles plus tard, le problème de la connaissance des causes est posé par Laplace sur le versant du probable, et il se transforme avec Cournot vers la statistique.
Les deux derniers chapitres qui constituent la cinquième partie, analysent les programmes d’enseignement, dont le dernier bouleversement (appliqué dès la rentrée 2000) a de nouveau montré que leurs modifications se trouvent dans des changements de conceptions, voir des confrontations.

Cet ouvrage retrace les interventions qui furent données pendant le colloque organisé en 2002 par l’IREM d’Orléans et la CII Epistémologie et Histoire des mathématiques :

1. Histoires de chances et de hasards
– Le problème des partis avant Pacioli par Norbert Meusnier
– Huygens et ses lecteurs : le cinquième exercice par Denis Lanier et Didier Trotoux
– La portée physique et sociale de la règle de Bayes par Jean-Pierre Cléro

2. Histoires de décisions
– Le joueur et le banquier : sur une correspondance des frères Huygens par Bernard Parzysz
– Tables de natalité, tables de mortalité par Henry Plane, Frédéric Métin et Patrick Guyot

3. Histoires de rencontres des probabilités et des statistiques
– La démonstration par Jacques Bernoulli de son théorème par Michel Henry
– La théorie des erreurs (1750-1820), enjeux, problématiques, résultats par Michel Armatte
– Statistique et modèles probabilistes de Fisher à Havelmoo par Martin Zerner

4. Histoires de causes : probabilités des causes et investigations des causes
– La controverse antique sur les futurs contingents par Michèle Tainmont-Villetard et Joëlle Delattre
– Laplace et la Théorie analytique des probabilités : itinéraires de découverte par Jean-Pierre Lubet
– Cournot, statistique et raison des choses par Thierry Martin

5. Histoires de l’enseignement des probabilités et des statistiques
– Sur l’histoire de l’enseignement des probabilités et des statistiques par Norbert Meusnier
– Galilée ou Descartes ? Etude d’un scénario d’introduction historique au calcul des probabilités par Eric Butz